HISTOIRE de la LSF (Langue des Signes Française)

Dans l’Antiquité, l’intelligence est étroitement liée à la parole.

« La faculté d’apprendre appartient à l’être qui, en plus de la mémoire est pourvu du sens de l’ouïe »

Aristote

Les sourds, isolés, ne peuvent enrichir leurs langues signées et doivent se contenter d’une gestuelle simpliste. Sans éducation par ailleurs, ils sont parfois pris pour des simples d’esprit.

A partir du 16ème siècle, des peintres sourds tels que Navarette ou Pinturicchio sont reconnus.
En Espagne, grâce au travail de précepteurs tel Pedro Ponce de Leon, des enfants sourds issus de la noblesse ont accès à l’instruction, à travers l’alphabet manuel notamment.

800px-charles-michel_de_lepeeEn 1760, L’abbé de l’Épée est, le premier entendant connu à s’intéresser à ce mode de communication des « sourds-muets ».
En observant 2 jumelles sourdes communiquant entre elles par gestes, il découvre l’existence d’une langue des signes. Avec conviction, il utilise une partie  des signes de cette langue ainsi que des signes inventés, qu’on appellera les « signes méthodiques » servant à illustrer la grammaire française, pour instruire les enfants sourds. Il ouvre une école pour sourds qui deviendra l’Institut National des Jeunes Sourds, aujourd’hui Institut Saint-Jacques, à Paris. L’abbé de l’Epée est connu des Sourds dans le monde entier.

Dans la même période, le courant « oraliste » s’amplifie. Les « oralistes »pensent que les sourds doivent apprendre à parler pour s’intégrer dans la société. Le congrès de Milan en 1880 décrète : « que la méthode orale pure doit être préférée ».
Plusieurs raisons sont invoquées dont :

  • la Langue des Signes n’est pas une vraie langue,
  • elle ne permet pas de parler de Dieu,
  • les signes empêchent les sourds de bien respirer favorisant donc la tuberculose.
Cette décision a des conséquences dramatiques pour les sourds :

Pendant 100 ans la langue des signes est interdite, au sein des institutions, les professeurs sourds, déjà relégués au rang de simples répétiteurs, se verront désormais licenciés, au profit de l’apprentissage unique de l’oralisation. La langue des signes survivra donc, en cachette, dans les dortoirs et les recoins des cours de récréation, et en dehors du monde institutionnel.Ce nouvel état rend cette langue marginale et méprisée. Le « siècle d’oralisme » aura des conséquences graves sur l’évolution de la langue qui ne pourra se développer.

Quelques personnes célèbres réagissent

« Qu’importe la surdité de l’oreille quand l’esprit entend ? La seule surdité, la vrai surdité, la surdité incurable, c’est celle de l’intelligence »

Victor Hugo

Durant les années 1980, se produit ce que les sourds appellent le « réveil Sourd ».

La langue des signes commence à reconquérir ses lettres de noblesse avec le linguiste William Stokoe qui l’étudie comme une véritable langue.
Des chercheurs en linguistique et en sociologie tels que Christian Cuxac et Bernard Mottez poursuivent ce travail et mettent en avant la culture sourde qui y est rattachée.
Par ailleurs, un travail culturel est mené par Jean Gremion (écrivain, journaliste et metteur en scène) et Alfredo Corrado (un artiste sourd américain). Ils créent en 1976, l’International Visual Theatre (IVT).
Dès lors, ils travaillent à la requalification de la langue des signes.
En parallèle, une réflexion est menée sur l’enseignement auprès des élèves sourds. La philosophie bilingue Langue des Signes Française (LSF) / Français commence à germer dans les esprits.

En 1980 est créée l’association « 2 Langues pour une Education »

En 1988, 2LPE Centre Ouest, à Poitiers, œuvre pour la mise en place de classes bilingues, la promotion et la reconnaissance de la Langue des Signes comme langue à part entière, et ceci dans un contexte législatif et sociologique difficile.

000663750Dans les années 90, les sourds et la LSF commencent à être reconnus par le grand public. Des films, des pièces de  théâtre et l’engagement de plusieurs associations pour la sensibilisation de la culture sourde, permettent une meilleure reconnaissance des droits des sourds.
Emmanuelle Laborit, comédienne sourde, reçoit en 1993, le Molière de la révélation théâtrale.
Cette même année  le documentaire « Le pays des sourds » de Nicolas Philibert montre cet univers totalement inconnu des entendants.

Dans le même temps, le métier d’interprète en LSF/français se professionnalise et est validé par un diplôme.

En janvier 1991, la loi Fabius est amendée :
« Dans l’éducation des jeunes sourds, la liberté de choix entre une communication bilingue – langue des signes et français- et une communication orale est de droit »
Progressivement les mentalités évoluent.
Les combats menés depuis 25 ans pour la reconnaissance de la langue des signes commencent à porter leurs fruits : la Loi du 11 février 2005 reconnaît la LSF comme « langue à part entière ».

En 2008, la LSF devient une option pour le Bac, comme n’importe quelle autre langue.

En 2010, le CAPES de LSF est créé.

Malgré toutes ces avancées, la place des Sourds dans la société est encore difficile à trouver :
Dans le système scolaire, seuls 5 % des enfants sourds reçoivent un enseignement en Langue des Signes.
La France dénombre seulement 13 classes qui permettent aux enfants sourds de suivre une scolarité en LSF de la maternelle au CM2, 4 collèges et 4 lycées.

Source : https://www.signesetformations.com/